Fin juillet 2019, le gouvernement a publié une instruction aux préfets pour leur demander d’accompagner les collectivités dans la lutte contre l’artificialisation des sols. Retour sur les leviers dont disposent les collectivités.
Ces dernières années, l’artificialisation des sols a conservé un rythme soutenu. Pour freiner l’étalement urbain, le Gouvernement a lancé, le 04 juillet 2018, un plan biodiversité qui fixait un objectif ambitieux en direction des collectivités : atteindre le « zéro artificialisation nette (ZAN) ». Par ailleurs, la Convention citoyenne pour le climat est venue conforter la nécessité de ralentir voire d’arrêter l’artificialisation des sols pour refaire entrer la nature en ville et faciliter l’accès des citoyens aux espaces naturels environnants ! Parmi les propositions formulées figuraient la nécessité de mettre en place un moratoire pour les futures zones commerciales en périphérie des villes.
L’artificialisation des sols, c’est quoi exactement ? Ce processus consiste à transformer un sol naturel, agricole ou forestier par des opérations d’aménagement (construction d’un lotissement, d’un centre commercial…). Cela peut concerner les sols bâtis et les sols revêtus et stabilisés (routes, voies ferrées, parkings, chemins…) ou encore les chantiers, les terrains vagues et les espaces verts artificiels.
En début de mandat, les Maires ainsi que les élus en charge de ces questions seront rapidement confrontés – notamment via l’élaboration des documents de planification (PLU, PLUi, SCoT, ZAC…) à des enjeux d’aménagement et d’organisation de leur commune. Au regard des enjeux environnementaux engendrés par l’artificialisation, les élus devront être extrêmement attentifs dans leur choix. Des actions et des leviers existent pour freiner la tendance !
Des conséquences importantes sur le plan environnemental et économique
L’artificialisation des sols en France se produit au rythme d’environ un département tous les 7 ans, ce qui pose les problèmes suivants :
- Appauvrissement de la biodiversité et dégradation du fonctionnement des écosystèmes,
- Renforcement des îlots de chaleur et in fine des vagues de chaleur (les sols artificialisés captent plus de chaleur que les sols naturels),
- Accélération du ruissellement des eaux pluviales et accroissement du risque d’inondations (du fait de l’imperméabilisation de certains sols),
- Allongement des distances domicile-travail, qui génère une hausse des émissions de CO2,
- Perte de terres arables et menace sur l’alimentation.
Le Maire a le pouvoir d’agir sur ces sujets puisqu’il est nécessaire d’obtenir son accord pour les permis de construire. A leur échelle, les élus peuvent agir pour mettre un coup d’arrêt à l’artificialisation !
A noter : le ministère de la Transition écologique a annoncé l’ouverture d’un appel à manifestation d’intérêt (AMI) auprès des collectivités pour soutenir des projets urbains tendant au zéro artificialisation nette (ZAN). L’AMI s’adresse aux villes moyennes déjà engagées dans une opération de revitalisation du territoire (ORT). Les villes accompagnées seront suivies pendant 3 à 5 ans ! L’AMI sera ouvert en octobre et les collectivités pourront candidater en novembre pour une sélection en décembre.
Retour sur quelques exemples d’actions qui peuvent être menées par les collectivités sur différents volets
La lutte contre l’artificialisation sur le long-terme peut se faire à l’aide de plusieurs outils.
- En inscrivant certains principes dans les documents d’aménagement communaux et intercommunaux ou en usant d’outils réglementaires et fiscaux.
Plusieurs pistes de solution peuvent être envisagées :
- Inscrire le principe d’un arrêt de l’artificialisation des espaces naturels dans le Plan local d’urbanisme (PLU) ou le Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) et décider de ne plus déclasser les terrains naturels et agricoles en terrains constructibles,
- Reclasser en terrain naturel des terrains constructibles de longue date qui n’ont pas été urbanisés,
- Réutiliser les espaces vacants plutôt que bétoniser des espaces verts,
- Structurer un réseau de piste cyclable et/ou de lignes de bus donnant accès aux espaces naturels environnants,
- Inciter les aménageurs et promoteurs à prévoir un quota important d’espaces verts dans tout projet immobilier d’habitation ou de commerce,
- Exonérer de taxe d’aménagement les projets qui ne changent pas l’emprise au sol bâti (ex. rénovation).
A noter : soyez vigilant, des contraintes trop dures ou appliquées sans concertation peuvent réduire l’attractivité de la ville.
- En mettant en place des mesures de compensation pour renaturer les espaces artificialisés.
Plusieurs pistes de solution peuvent être envisagées :
- Lancer une campagne de communication pour inciter les habitants à fleurir leurs jardins, balcons et terrasses,
- Donner aux habitants un « Permis de végétaliser » l’espace public, pour les autoriser à jardiner dans la rue et à participer à des actions collaboratives de végétalisation de zones prédéfinies de l’espace public (ex. semer des roses au pied des arbres, remplir d’herbes aromatiques des pots dispersés sur les trottoirs, mettre en place des jardins et potagers partagés…),
Ils l’ont fait ! La municipalité de Maurepas (Yvelines) a autorisé ses habitants à végétaliser l’espace public. Les plantes grimpantes le long des murs, les plantations au pied des arbres et celles dans des bacs en bois ont été privilégiées. Les personnes intéressées ont dû déposer leur demande de “permis de végétaliser”, accompagnée d’un projet, en mairie. Ce dernier est étudié et s’il est accepté, le permis de planter est délivré gratuitement pour une période d’un an renouvelable. Les résultats ont été concluants puisque ce dispositif a permis d’améliorer la biodiversité de la ville et d’embellir de nombreux quartiers !
- Créer dans chaque jardin public des réserves de biodiversité et une zone humide,
- Inciter la plantation d’arbres
Ils l’ont fait ! La ville de Montigny-les-Cormeilles (Val-d’Oise) a proposé à ses habitants de financer à 70 % l’achat d’un arbre fruitier, à fleur ou d’essence locale figurant sur une liste préalablement définie, pour un montant maximum de 200 euros. La condition ? Signer une convention avec la commune. La subvention municipale concerne également les copropriétés privées : la ville financera à hauteur de 10 000 euros les aménagements visant à fleurir les espaces verts (ex. mise en place de bacs hors sol, développement de jardins partagés ou de potagers collectifs…)
- Favoriser l’agriculture urbaine, les jardins potagers et partagés, qui présentent l’avantage de tisser du lien social et de favoriser une alimentation de meilleure qualité en circuits courts,
- Gérer les espaces verts de manière raisonnée en supprimant les traitements chimiques et en favorisant les espèces indigènes sur les terrains publics et ronds-points.
Zoom : les friches urbaines, un potentiel foncier à exploiter !
Pour votre prochain projet, exploitez une ressource souvent ignorée : la friche urbaine. L’objectif ? Faire entrer la nature ou de nouvelles activités économiques sur des anciens sites désertés, en installant des parcs de production d’électricité photovoltaïque par exemple.
A noter : le CEREMA a conçu un outil de cartographie en ligne, Cartofriche afin de permettre aux promoteurs et collectivités d’identifier les friches disponibles.
Ce contenu a été préparé par Philippine Gayraud de l’équipe Tous Politiques ! Il a pour objectif d’apporter des éléments d’informations aux élus mais ne se substitue en aucun cas aux sources officielles nationales ou locales avec lesquelles les élus sont en contact au quotidien. Il a par ailleurs été mis à jour pour la dernière fois le 11 septembre 2020.